dimanche 11 novembre 2007

Et Voila l' Travail !

Poème tragique :

Actualité permanente !

Au Sarkoland, la devise « travail, famille , patrie » est toujours de mise
« Finie, la semaine de 35 heures » , clame le nabot, imitant Paul Reynaud, président du Conseil en 1939, et qui , frétillant de joie à l’approche de la guerre, stigmatisait les travailleurs en leur crachant au visage : « Finie la semaine de 40 heures ».

Esclaves si la Croissance de nos profits diminue c’est votre faute ! Travaillez plus pour que nous gagnions plus !

« Educateurs, faites de nos enfants des forçats du travail, des bourreaux de travail que vous devez être vous mêmes ! Apprenez par cœur mon manuel de 38 pages du parfait petit soldat obéissant de « ma république » Vous devez être les apôtres obstinés du décervelage. Le sport à l’école, voilà un bon moyen pour vous aider dans cette noble tâche. Soyez capables de remplacer le prof de Gym s’il est absent !


A force de fanfaronner, le travail s’est pris les pieds dans le tapis!
Idole brisée, travail en morceaux, travail en miettes, vieux débris remisé au magasin des accessoires avec les autres instruments de torture.
Le bourreau de travail a fait son office. L’usure au travail a fait le reste. Travail, travail quand tu nous tenais... tu nous interdisais les folies !

Pénitent ou Héros... mais d’abord Esclave !
Le religieux ordinaire en a fait la punition éternelle, la sueur du repentir et de la souffrance, la condition à la béatitude de l’autre monde. Le religieux marxiste en a fait « une valeur », une morale à lui tout seul, un dogme, une massue massificatrice et soi-disant émancipatrice, un rouleau compresseur stakhanoviste, une monumentale cathédrale où l’individu, victime expiatoire, a été égorgé, en chantant la gloire du réalisme libérateur des lendemains qui chantent.
Le travail glorifié, sanctifié, mythifié, comme celui des « gueules noires » en 1945, à qui on dédiait des affiches héroïques dans les rues de Paris, est un attentat contre l’individu-homme. Etre une bête de somme dans le troupeau des bêtes de somme avec l’apitoiement charitable de la foule manipulée et béate, en prime...
Aujourd’hui encore, les dernières bêtes de somme défilent pour demander humblement quelques heures (35) de répit au bourreau !
Dans le film « Rosetta »(Belgique. 1999) on voit justifier l’indignité du comportement de l’héroïne par la « dignité» que lui apporterait n’importe quel travail contraint. « Arbeit macht frei ».
Chaque étape de ce chemin de croix est marqué au sceau infamant de la résignation et de la culpabilité de celui ou de celle sur qui la fatalité du « non-travail » s’est abattue.
On ne revendique pas pour exiger sa part des richesses confisquées par le maître... on lui demande le fouet du salariat.

Le Nom et la Chose...
En 1830, déjà, Blanqui comparaît les conditions de l’esclave des colonies françaises et celle du salarié : « Il y a du reste moins de différence qu’il ne parait d’abord entre l’état social des colonies et le notre. Ce n’est pas après 18 siècles de guerre entre le privilège et l’égalité que le Pays, théâtre et champion principal de cette lutte, pourrait supporter l’esclavage dans sa nudité brutale. Mais le fait existe sans le nom, et le droit de propriété, pour être plus hypocrite à Paris qu’à La Martinique n’y est ni moins intraitable ni moins oppresseur... »
Aujourd’hui, cette forme « moderne » d’esclavage qu’est le salariat n’est pas même contesté par ceux qui paradent avec le drapeau des « 35 heures » ... « 35 heures d’un contrat léonin », inégalitaire depuis la première heure. Grande avancée de la Justice...

Gloire à toi, mon fils... Tu seras « Pompeur à bénéfices »
Et pour aller au Ciel... acceptes de n’être qu’un « aide-matériel » ... Céline aurait souri de ce méprisable mot d’ordre des 35 heures, sans le « quoi » ni le « comment », lui qui écrivait en 1941, au temps de « L’Etat Français » de Vichy :
« ...S’il m’est permis de risquer un mot d’expérience sur le tas, et puis comme médecin, des années, un peu partout sous les latitudes, il me semble à tout bien peser que 35 heures c’est le maximum par bonhomme et par semaine au tarabustage des usines, sans tourner complètement bourrique...
« ... Y a pas que le vacarme des machines ; Partout OU SEVIT LA CONTRAINTE c’est du kif au même, entreprises, bureaux, magasins, la jacasserie des clientes c’est aussi casse-crane écœurant qu’une essoreuse-broyeuse à bennes...
Partout ou on obnubile l’homme pour en faire un aide-matériel, un pompeur à bénéfices, tout de suite c’est l’enfer qui commence ; 35 heures c’est déjà joli... »

Résignes Toi.. petit Âne bâté...
Contre la grégarisation, l’écrasement des particularités, la soumission aux ordres du chef de troupeau, Nietzsche écrivait déjà : « Dans la glorification du travail, dans les infatigables discours sur “la bénédiction du travail”, je vois la même arrière pensée que dans les louanges des actes impersonnels et conformes à l’intérêt général : la crainte de tout ce qui est individuel.
» On se rend maintenant très bien compte, à l’aspect du travail — c’est-à-dire de ce dur labeur du matin au soir — que c’est là, la meilleure police, qu’elle tient chacun en bride et qu’elle s’entend vigoureusement à entraver le développement de la raison, du désir, du goût de l’indépendance. Car le travail use la force nerveuse dans des proportions extraordinaires et la soustrait à la réflexion, à la méditation, aux rêves, aux soucis, à l’amour et à la haine ; il place toujours devant les yeux un but minime... » Nietzsche Frédéric, Aurore, 1881.
Le travail a toujours eu le mauvais œil, il porte la guigne. Victimes, accidentés, médaillés du travail : tu as la médaille de la honte après trente ou quarante ans de bons et loyaux services, comme « traîne-misère », d’un patron « traîne-patins ».
Qui se souvient d’un air des années « 1900 » qui déplorait la triste condition de celui ou de celle qui, chaque matin « allait au Chagrin » : « ... car je ne suis qu’un employé, un traîne-misère, un salarié.. ».
Le travail est un bouche-trou, un pis-aller, une béquille. On s’y abandonne traqué par la faim. Certains malheureux s’y adonnent, le consommant comme une drogue. Prisonnier du travail, on déploie des trésors d’imagination pour s’y soustraire, pour l’esquiver, pour en adoucir la peine, en dériver le cours. Il faut bien vivre. Et l’esclavage n’est pas une vie...
« Tous les hommes se divisent, en tout temps et de nos jours en esclaves et libres ; car celui qui n’a pas les deux tiers de sa journée pour lui-même est esclave, qu’il soit d’ailleurs ce qu’il veut : homme d’état, marchand, fonctionnaire, savant... » Opus cité.
Les négriers des temps modernes ne font plus à visage découvert le commerce, la traite des hommes pour leurs plantations du nouveau monde. Ils restructurent, délocalisent et s’installent à proximité des gisements de matière première humaine. La mort d’un homme qu’ils écrasent de travail et de misère n’est plus à leur charge comme cela était lorsqu’il leur appartenait comme esclave. Ils n’ont plus à payer pour l’acheter ou le remplacer.
Et Moi !..
Moi, l’Unique, j’existe, je vis, je pense, je crée, j’imagine, j’invente, j’aime, je m’enthousiasme, je critique, je déteste. Contre moi le travail, la souffrance, la chaîne, l’accoutumance m’attendent au tournant. Guet-apens perpétuel depuis l’école, la caserne jusqu’au boulot contraint, consigné, encadré, et même « enrichi ».
« ... Car je ne suis qu’un employé, un traîne-misère, un salarié ... disait la chanson... »
« Ces jeunes gens ne manquent pas de caractère, ni de dispositions, ni de zèle : mais on ne leur a jamais laissé le temps de se donner eux-mêmes une direction, les habituant au contraire, dès leur plus jeune âge à en recevoir une. Lorsqu’ils furent mûrs pour être envoyés dans le “désert” on agit autrement — on les utilisa, on les déroba à eux-mêmes, on les éleva à être usés quotidiennement, on leur en fit un devoir et un principe — et maintenant ils ne peuvent plus s’en passer, ils ne veulent pas qu’il en soit autrement.
» Mais, à ces pauvres bêtes de trait, il ne faut pas refuser leurs “vacances” ainsi nomme-t-on cet idéal d’oisiveté d’un siècle surmené — : des vacances où l’on peut enfin paresser à cœur joie, être stupide et enfantin. » (Nietzsche Frédéric, Aurore, 1881.)
Alors puisque le travail, après le crédit, est mort sur le zinc des derniers bistrots, brisons les machines à décerveler. En avant pour la grande cure de désintoxication... Poétons enfin plus haut que nous avons le cul...

Archibald Zurvan avec l’aimable concours de Louis-Auguste Blanqui, Frédéric Nietzsche, Ferdinand Céline. Déc. 1999.

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