vendredi 18 novembre 2011

PROUDHON et L'ANARCHIE




PROUDHON ET L’ANARCHIE

«… Car si Proudhon est anarchiste, selon sa célèbre parole de 1840, il est aussi « ami de l’ordre » (philosophie du progrès.74)… » (1)

La Société Pierre Joseph Proudhon organisait, ce samedi 5 novembre 2011, son « Colloque international annuel ». Selon le président de la Société Proudhon, s’exprimant devant une quarantaine d’auditeurs, 3 rue Cabanis à Paris 14ème, c’était la première fois depuis la naissance de la Société que le nom de Proudhon était associé à celui d’Anarchie dans le titre de l’un de ses nombreux colloques. Il s’en étonnait, la Société Proudhon étant née en Mai 1982, il y a donc trente ans.
Trente ans sans que le père de l’Anarchie n’entende résonner ce mot autrement que dans les diverses et savantes analyses des nombreux conférenciers qui, pendant ces multiples colloques annuels, disséquèrent la pensée, la philosophie des mœurs de Pierre Joseph.

Enfin vint le jour tant attendu ou « l’Anarchie » fut au frontispice, accolée à son patronyme.  Malgré sa modestie bien cachée et ses doutes sur la vitesse à laquelle se construirait son idéal, il sourit aux anges de l’immanence.
Lui qui refusait d’être le chef d’un parti pour éviter de se voir entouré de « croyants » perclus de « confiance » et qui traitait les « proudhoniens » d’imbéciles s’aperçut qu’il pouvait y avoir quelques universitaires qui tentaient d’approcher, avec plus ou moins de succès, la cohérence et l’actualité de son propos.
L’exposé, notamment, dans lequel fut souligné le lien indissociable entre son « Idéal et son pragmatisme » lui plut. Qui d’autre, parmi ses contemporains, avait argumenté l’ineptie et la dangerosité des solutions utopistes communautaristes et des adeptes d’un système – clé en mains – (Marx), prêt à prendre la place, table rase en étant faite, de la « féodalité économique et financière ». A l’inverse, il fallait s’attaquer au réel, en décrire les éléments négatifs et positifs et imaginer, sans attendre un improbable « grand soir », des formes nouvelles d’organisation économique et sociale. L’idéal de l’Anarchie est contenu dans le concret et l’actualité de ses propositions de nouvelles formes de l’échange économique et de la relation sociale. Ce concret, c’est le « contrat » (foedus) qui remplace l’autorité de la loi et qui se traduit par l’égalité et la réciprocité dans l’échange des produits et services (mutuellisme) ainsi que dans toutes les autres relations sociales «(fédéralisme). La confrontation avec les structures et l’idéologie capitaliste sera dure. Dans ce combat il importera de ne pas se défaire de l’idéal, de l’arme de la liberté dans la justice : l’Anarchie.
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Une autre contribution toucha sa corde sensible. Toute sa vie, il avait voulu combattre la misère ouvrière, l’injustice, l’iniquité que constitue le salariat, ce contrat « léonin ». L’exposé sur l’influence que ses idées eurent sur le mouvement ouvrier de la seconde partie du 19ème siècle, et en particulier sur le syndicalisme révolutionnaire, le réjouit. Enfin, les classes ouvrières se défiaient de la camarilla politique. Sauraient-elles aller jusqu’au bout et ranger aux oubliettes cette caste arrogante, ces députés dont il fut et qui, pour lui, n’étaient qu’un simple « fait ».  Le « droit » dont ils se paraient était tout bonnement le droit de la « force ». Seront-ils capables, ces syndiqués qui semblent l’avoir compris, d’entraîner, à l’occasion d’élections, la majorité des déshérités dans une abstention massive, et mettre ainsi ces prétendus « représentants » du peuple « hors la loi » ? (2)

D’autres propos, au cours de cette journée qui lui était consacrée, le laissèrent de marbre. Ainsi s’assoupit-il quand il entendit prétendre qu’il avait mis en parallèle deux formes d’Anarchie, l’une négative, l’autre positive. Le fait qu’il ait, à l’occasion, utilisé le mot anarchie pour désigner le désordre, reprenant l’injure gouvernementale utilisée dans la langue populaire, signifierait qu’il élabora une théorie, un système, une morale fondés sur le désordre : « L’Anarchie négative ». Si désordre il y a, il résulte de l’oppression des pouvoirs et suscite révoltes et manifestations.

 C’est justement contre ce désordre, ce chaos économique et social, fer de lance du capitalisme, que Proudhon a bâti sa philosophie des mœurs, son Anarchie. De même, énoncer que « bien qu’anarchiste, il aime l’ordre » ou encore qu’après une période d’anarchie négative, il en serait venu à l’anarchie positive sont des non-sens. Conceptualiser une « anarchie négative », c’est faire de Proudhon (avant sa repentance) un adepte de la loi de la jungle, d’une liberté sans morale, l’assimilant ainsi au capitaliste ou au « libertarien ». 
Mais chacun pourra se faire une opinion sur le contenu des 7 contributions qui alimentèrent cette si intéressante réunion de la Société Proudhon que l’assemblée générale annuelle ne put se tenir. En effet les « actes du colloque 2011 paraîtront dans les mois qui viennent et peut être en mai 2012, puisque seront fêtés les trente ans de notre association.

Archibald Zurvan.
Membre de la Société Proudhon depuis 1990.

(1) Dictionnaire Proudhon P. 322 . Editions « ADEN » 44 rue Antoine Bréard  1060 Bruxelles.  Remarquons cet "aussi"qui laisse entendre l'existence de deux conceptions opposées de l'Anarchie! Une "coquille", sans doute...
 (2) A noter que le jeudi 10 novembre 2011 s'est tenue à Besançon une « Journée Electorale » de France Inter. Cette radio organise en effet dans 12 villes des réunions et débats en direct. A Besançon est invité, pour la préparation de la Foire du Trône (La présidentielle 2012), le député socialiste Moscovici, ancien porte étendard de Strauss Khan et désormais « harangueur » d’Hollande.  Dommage que Pierre Joseph soit absent.

















jeudi 10 novembre 2011

LA FOIRE DU TRONE


DIVERTISSEMENT ET PRIERE : LES ARMES DE LA « DEMOCRATIE »

Pendant ces mois d’été et d’automne 2011, les évènements nous aurons confirmé que la « Démocratie » avait, outre l’armée et la police, plusieurs cordes à son arc.  Ou plus précisément, ceux qui, en son nom,  prétendent avoir ou obtenir l’usage de la « souveraineté populaire », savent mettre en scène un spectacle « primaire » tout autant que délivrer, par les bombes, un peuple, d’une dictatoriale servitude, afin de lui permettre de se soumettre à la loi des « serviteurs » d’Allah. 


UNE VRAIE FÊTE « DEMOCRATIQUE »

Quel succès digne de Merlin l’enchanteur  que cette « foire primaire » socialiste, ce second épisode de La Foire du Trône  ! (1)
Trois mois durant des marionnettistes émérites se sont déployés « social démocratiquement » sur toutes les scènes de l’hexagone. Ils étaient six polichinelles à tenter d’éblouir le public. Avides de nouveaux jeux, de « talk shows », de parades de majorettes politiques, les médias se sont régalés. Les six saltimbanques ont su déployer leur talent. Leur pantomime fut sans faille, sachant habilement lier le geste à la parole. Ceux qui craignaient une belle empoignade furent déçus. Et pourtant,  la troupe des comédiens n’était pas soudée. La compétition pour le « trône » laissait présager un léger affaiblissement de la solidarité des chantres du socialisme multiforme. Il n’en fut rien. Mise à part quelques accents mis sur la mollesse, la « normalité », le charisme de certains batteurs d’estrade, la course au podium fut sans dérapage. Il est vrai que les spectateurs participant à ce jeu, à cette loterie sans gagnant parmi eux, furent à la hauteur. Deux ou trois millions de fidèles choisirent avec recueillement et fébrilité cachée leur aspirant au trône.

UN CHOIX POUR UN  DIVIN DEMOCRATE

Mais qui est-il donc, ce prétendant au trône élyséen qui enthousiasma la cohorte de religieux, fervents adeptes d’une souveraineté populaire déléguée à un grand (ou petit) prêtre ? Un écrivain tchèque, qui portraitura le « Brave soldat Chweïk » et créa, au moins en imagination, un parti politique « cohérent » et conscient de ses responsabilités à l’égard des masses, définissait ainsi l’ambition de ce parti de progrès social et de son chef : « Le Parti pour une réforme modérée dans les limites de la loi ». Tout est contenu dans l’appellation ! Et il est vrai que, sans avoir l’envergure du « Hollandais Volant » (2), le hollandais de Corrèze est à la bonne hauteur. Il soulignait  le 15 juin 2011 (Le Monde), au début de la « Foire »,  la nécessité d’ « avoir confiance dans la démocratie sociale ». Il précisait que cette « démocratie sociale » ne devait pas être considérée par la gauche comme son apanage, la droite s’y entendant tout aussi bien. Mais, ajoutait-il, «  l’Etat doit rester le garant de la cohésion nationale et de l’ordre public… » … « d’autant que souvent c’est la loi qui protège, et la liberté  des acteurs qui menace ».  En matière de « liberté d’expression », Hollande a inscrit dans son programme un projet de loi interdisant de nier, sous peine de prison, une vérité historique, le massacre du peuple arménien par les turcs. Ainsi, Il se fait fort d’imiter son collègue communiste Gayssot qui fit voter la loi liberticide punissant ceux qui nieraient l’existence des massacres des juifs par les nazis. Comme si la bêtise ou le mensonge méritaient la prison. Dans la même veine, le chanoine du Latran disait à un universitaire « populaire » que la liberté, c’était la « transgression »(3). La « modération dans les limites de la loi » est le signe rassurant de la « normalité » de l’aspirant au pouvoir. Et puis, il dispose de plusieurs « réservoirs d’idées ». Ce sont les fameux « Think Tank » qui, comme les « primaires », nous viennent tout droit des Etats Unis. Ils s’appellent « Terra Nova », « Les Gracques » (4) et sont composés de « penseurs » modérément réformistes venus de la Banque (Rothschild), du Conseil d’Etat, de l’Académie, des cabinets de Ministères (Rocard). En bref, une brochette bien décidée à aider notre modeste prétendant à accéder à la royauté démocratique. Ils lui feront endosser cette fameuse « tunique de Nessus » (5), ce cadeau dont on ne se débarrasse pas et qui aide à mener son peuple sur « le chemin du salut » (sic) grâce à l’augmentation de la TVA, la réduction du budget des collectivités locales, la baisse des salaires des fonctionnaires et l’amputation des dépenses sociales. (Le Monde  septembre 2011). Déjà, à leurs débuts, un des « Gracques », un certain Matthieu Pigasse (6) avait déclaré : « il est temps que le PS fasse sa mue idéologique et accepte l’économie de marché ».(3bis)

ALORS !...ON VOTE ?… démocratiquement

Eh bien voilà,  la fête de l’été est terminée. Ce fut  un beau foirail où s’exposèrent de solides bêtes de scène. Le marché était organisé  par un parti exsangue, incapable de mettre au point, lui-même, un projet « cohérent », un parti désemparé devant la cavalcade de ses petits chefs se bousculant au portillon pour endosser le maillot d’outsider dans la course au tabouret élyséen.  Au point que, ne sachant à quel saint se vouer, il implora la vile multitude de vouloir bien choisir à sa place. Le feuilleton était parfait. Cependant quelques mauvais esprits trouvèrent la faille. C’était un parti se reniant  aussi bien sur la question de la personnalisation du pouvoir, recette anti-républicaine, que sur celle de la concentration de l’autorité sans frein entre les mains d’un individu. Dans ces conditions peut-on dire que le suffrage universel, le vote, la remise, par délégation, d’un pouvoir absolu entre les mains d’un homme, si « normal » qu’il se trouve, ait un sens ?

Tant qu’il s’agissait d’une compétition entre acteurs de comédie politicienne, l’« Homo festivus », comme disait l’écrivain Philippe Muray, pouvait s’en donner à cœur joie. Choisir un cheval de course, un guignol de télé, c’était un pari spectacle sans grande conséquence. Plus déraisonnable serait de poursuivre ce qui n’était qu’un jeu sans grande portée, en allant choisir un « Président ». Mais la raison a-t-elle encore cours dans ce qui, d’une dérisoire mais festive réunion de parieurs, se transforme, par le bulletin de vote, en un pèlerinage de « fidèles » qui, religieusement, se donnent un maitre ?

Par cette interrogation, « Alors, On vote ? », il n’est pas question, ici, de dicter une conduite, de faire preuve de ce que Camus appelait l’ « Autorité d’entrainement ». C’est précisément  parce que les tenants du pouvoir politique ou financier nous font croire que notre pouvoir d’individu, notre importance, et donc notre devoir est de voter, c’est-à-dire de confier notre volonté, nos besoins, nos espoirs à des « spécialistes » plus capables que nous, et à qui nous devons faire confiance, qu’il appartient à chacun de nous de choisir ce qu’il a à faire, c’est à dire d’accepter ou non d’être marqué comme inapte à intervenir directement dans les affaires de la cité. Le geste qui s’attache à ce choix, et qui, pour les futurs élus, fait notre gloire et notre puissance, n’est pas seulement  un renoncement  mais un encouragement à ce que se perpétue l’injustice sociale.
Il est vrai que, lorsqu’on parle de « confiance », on entre dans le domaine de la foi, du sacré. Proudhon, répondant négativement à ses amis l’invitant à créer un parti proudhonien, expliquait qu’il ne voulait pas des fidèles lui faisant « confiance », s’abandonnant ainsi sans prise de position personnelle et raisonnée à une sorte de « croyance » en un homme ou un parti. A l’adepte de la confiance, source d’un éventuel renoncement voire d’un aveuglement, il opposait celui qui « pense », qui essaie de juger, de critiquer, de se faire une opinion personnelle. Croire ou penser, il faut choisir.

AU CROYANT EN UN DIEU DEMOCRATIQUE

A vrai dire, entreprendre de faire raisonner un adepte d’une quelconque religion, adorateur de Jésus, d’Allah, de Jéhovah ou de quelque gourou d’une secte, d’un parti ayant pignon sur terre ou dans les cieux, est pure forfanterie. Quelle outrecuidance, quelle démesure pleine d’orgueil que de vouloir convertir à la « pensée », à la raison, à la critique, celui qui est l’heureuse et consentante proie d’un dogme, d’un absolu, d’un « père éternel » ! Mais, comme diraient Charles le téméraire ou Guillaume 1er d’Orange, « il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer ». Alors, entreprenons !

Le sociologue, Pierre Bourdieu, parlant du vote et donc de la délégation de pouvoir, considérait cette opération comme du « fétichisme politique ». Un croyant peut-il accepter sans sourciller ce culte des idoles, cette sorte d’idolâtrie condamnée par sa propre religion ? Comble de turpitude, le fétiche n’est pas une divinité céleste ou terrestre, mais un simple membre du troupeau humain. A quel titre, par conséquent, cette « idole », recevant par délégation le pouvoir qu’un individu lui confie, en l’invitant à l’exercer sous son contrôle et en son nom, pourrait-elle s’arroger impunément le droit de retourner ce pouvoir, qui ne lui appartient pas, contre le véritable détenteur ? Un tel abus, une telle escroquerie, ne sont-ils pas considérés comme « péché » par les Eglises ? Il n’est point que le lettré qui s’étonne de telles pratiques. Un simple lecteur ( Le Monde 4 octobre) écrit : « … ce que nous subissons aujourd’hui est le résultat des actions de nos élus et donc indirectement de notre vote…  nous pouvons toujours nous indigner et reporter la faute sur les autres, mais regardons nous dans la glace, le responsable, c’est nous… ». Cessons donc de pécher. Ne redoublons pas la faute, par une simple repentance. Il n’est pas utile de faire, dans l’actualité, la liste des manquements à la vertu des détenteurs de ce pouvoir qui était le nôtre avant la fatale décision de nous en dessaisir. Qu’ils soient assis confortablement sur le trône de notre monarchie républicaine ou simples laquais stipendiés des Institutions, le pouvoir que nous leur avons abandonné les a plongés  dans le stupre et la plus ignoble perversion. Alors, arrêtons de les avilir plus longtemps en nous avilissant nous-mêmes. De ceux qui font commerce de l’idéal de justice sociale, Charles Péguy disait : « L'idéal, c'est quand on peut mourir pour ses idées, la politique c'est quand on peut en vivre. » Quant à Hannah Arendt, elle complétait : « Les Républiques meurent du rire et du mépris des peuples pour leurs dirigeants ». Alors ne succombons pas à la tentation de fabriquer, en allant aux urnes, de nouveaux pantins méprisables et délivrons nous de ce mal. Même nos évêques, se disent « cruellement consternés » par le climat produit par les « affaires » (Le Monde octobre 2011).

AUX HOMMES ET FEMMES « » LIBRES »

Il n’est pas facile de se « débarrasser du Sacré », disait Stirner. Ceux ou celles qui ont réussi, même provisoirement, dans cette tâche sont, en principe, plus perméables à la raison, à une argumentation fondée sur le réel. Les faits sont têtus. Sauf à pratiquer la politique de l’autruche, à se plonger la tête dans le sable ou dans le ciel, la réalité de tous les jours nous touche de plein fouet. Notre vie au quotidien est conditionnée par le fonctionnement de la Société où nous évoluons, à laquelle nous participons, et par le comportement de ceux qui prétendent la diriger en notre nom. Le constat, illustré chaque jour, que nous pouvons faire de ce comportement nous conduit à douter de leur capacité à mener à bien la tâche que nous leur avons confiée. Il en résulte que nous avons à chercher d’autres modes de fonctionnement dans lesquels nous nous impliquerions plus directement, plutôt que de donner un blanc- seing , « à l’aveugle », à des personnages que la Constitution nous interdit de contrôler pendant leur mandat. Si nous donnons notre pouvoir à un autre, c’est sous la réserve qu’il n’exécute que la mission précise et limitée que nous lui avons confiée et que nous puissions à tout moment nous assurer qu’il l’exécute selon notre volonté.
La conséquence de cette limitation du pouvoir délégué, de sa primauté locale et non nationale, est la disparition de ceux qui se prévalent du titre ronflant de « représentants du peuple », et qui, de fait, constituent une catégorie bien à part et dont la distance avec ceux dont elle prétend avoir la charge n’a fait que s’accroitre. Aussi bien, nous sommes responsables de l’avoir installée, symbole tragique, dans les palais de la Royauté, de l’avoir fait succomber à la tentation de s’acoquiner aux plus riches et aux plus conservateurs de l’élite financière, économique et intellectuelle. Et ceci, entre autres félonies, et vieille référence à l’empire napoléonien, en acceptant qu’elle conçoive la justice sociale comme une construction condescendante de « bureaux de bienfaisance ».

Ne nous étonnons pas , dans ces conditions, du coup de gueule de Libertad (7)
LE CRIMINEL, C’EST L’ÉLECTEUR ! TU TE PLAINS ; MAIS TU VEUX LE MAINTIEN DU SYSTÈME OÙ TU VÉGÈTES Tu élabores tout et tu ne possèdes rien ? Tout est par toi et tu n’es rien. Tu es l’électeur, le votard, celui qui accepte ce qui est ; celui qui, par le bulletin de vote, sanctionne toutes ses misères ; celui qui, en votant, consacre toutes ses servitudes. Tu es un danger pour nous, hommes libres, pour nous, anarchistes. Tu es un danger à l’égal des tyrans, des maîtres que tu te donnes, que tu nommes, que tu soutiens, que tu nourris, que tu protèges de tes baïonnettes, que tu défends de ta force de brute, que tu exaltes de ton ignorance, que tu légalises par tes bulletins de vote, — et que tu nous imposes par ton imbécillité. [...]Nous autres, las de l’oppression des maîtres que tu nous donnes, las de supporter leur arrogance, las de supporter ta passivité, nous venons t’appeler à la réflexion, à l’action.

Cet appel à la réflexion et à l’action peut-il avoir un écho chez ceux qui, sans servir un dieu ou un gourou, sont tout simplement indifférents . Ils « ne font pas de politique ». « C’est trop compliqué ». « Les voisins vont bien voter, eux ». Ce comportement grégaire,   Zo d’Axa dans « Bêtes sacrées » l’évoque : On ne raisonne pas, on trotte, on suit la mode, On se laisse toujours conduire, influencer,
Et comme tout le monde on agit, c'est commode,
Puis ça ne donne pas la peine de penser... "
« Ils ont voté…et puis après », chantait Léo Ferré.

Pas la peine de penser ! Alors quel stimulus employer pour débloquer la mécanique ? L’actualité des images et des mots ? L’exemple de ces peuples arabes d’Egypte, de Libye, de Tunisie, qui se sont levés contre l’arbitraire et la férocité de leurs gouvernants - que ceux-ci soient des dictateurs ou des produits démocratiques d’un vote - et qui sont convoqués à nouveau par des aspirants à la succession, est-il assez éclairant ? Déjà le résultat du récent vote tunisien démontre sa nocivité. Tombant de  « Charybde en Scylla le peuple « souverain » de Tunisie change de joug.…….une « charia », constitution de la soumission, ne peut que faciliter la tâche du chef». La « Justice » du Dieu de la résignation et de ses sbires va remplacer celle d’un tyran qui exerçait son autorité criminelle à titre personnel. L’avantage des futurs dirigeants de la Lybie ou de la Tunisie, c’est qu’ils pourront se dédouaner plus aisément de leurs méfaits puisque ces derniers ne peuvent être inspirés que par Dieu. « Islam », traduisait Proudhon, signifie « Résignez-vous ». Triste et dérisoire épilogue d’un « printemps des peuples. Un espoir de révolution, qui n’accoucha même pas d’une « sourate », Il ne faudrait pas qu’un jour on dise : il ne « charia » que la servitude !

DEMOCRATIE ?  Qu’est ce ?

Un bulletin de vote ?

Pour ceux qui tiennent les rênes de l’Etat et leurs acolytes, la démocratie est une formalité. Le bulletin de vote une fois déposé, la démocratie règne. Le peuple a librement fait son choix de ceux qui sauront le conduire : il n’a plus à intervenir ; il attendra la prochaine « consultation » pour agir. Pendant ce temps (3,5,7 ans) ses critiques à l’encontre de ceux qui, selon lui, ne respectent pas leur parole et agissent à l’inverse de la délégation du pouvoir qu’ils ont reçus, seront sans effet. «  Cause toujours… », dit la Constitution, et patiente quelques années pour choisir, en toute « confiance » un autre « spécialiste ».

Alors, si tu ne peux renvoyer celui qui t’a trahi, il ne reste qu’à éviter de participer à une sorte de contrat « léonin » fondé sur l’inégalité des contractants. L’électeur est donc le « dindon de la farce. Le suffrage, disait Proudhon, est « menteur et charlatan ». En outre le fait de ne pas prendre en compte les idées et propositions de la minorité et de l’éliminer purement et simplement est une injustice. Le droit de majorité, disait-il, est le droit de la force.

Dans ces conditions la véritable action positive de celui à qui on demande de renoncer à son pouvoir et à le distribuer aveuglément à un inconnu est l’abstention ; « Songez à la portée de cet acte », dit Proudhon, « l’abstention, c’est la mise hors la loi »…de ceux qui veulent vous persuader de leur confier un pouvoir qu’ils exerceront contre vous.

La Liberté ?
Si être libre, c’est abandonner tout ou partie de son pouvoir, le vote est un acte
Libératoire ; je suis libéré d’un fardeau, de mes responsabilités, de ma singularité et de ma capacité d’acteur social ; alors, en effet, la liberté, c’est la servitude volontaire, dirait La Boétie. En tant que mécanisme formel, dit de représentation, le suffrage universel n’a donc rien à voir avec la liberté. La « démocratie », dans ces conditions, définie par le vote, n’est pas la liberté. Castoriadis la nommait : « Démocrature ».

La Justice sociale ?
Pour maquiller toutes les injustices, « démocratie »  est un mot à la mode. Il sert aux tenants du pouvoir à justifier leurs comportements, si injustes soient-ils. Ainsi, la « démocratie » dans l’Entreprise consiste à faire croire au salarié qu’il a son mot à dire dans la gestion de sa société et que l’actionnaire, qui lui a dérobé le fruit de son travail, va lui en rendre quelques miettes. On parle alors de « pseudo démocratie » (Le Monde 25 10 11). Mais en existe-t-il une « vraie » ?  Même un éminent philosophe allemand, Habermas, emploie à plusieurs reprises le mot magique pour tenter de justifier la création d’une « vraie gouvernance européenne » pour sortir de la crise financière. Peu importe les effets désastreux pour la majorité des européens de 50 années d’Europe, au Pères fondateurs emblématiques : Un banquier et un politicien conservateur qui voulait être prêtre catholique . (8) .

Les  Mouvements « Indignés » qui, en ces temps orageux, bousculent la planète montrent que la démocratie, qu’elle soit « pseudo » ou « islamiste » (Le Monde 25 10 11), n’a qu’un rapport très éloigné avec la justice, au sens du respect de la dignité humaine et de sa défense. Chaque jour l’actualité politique et sociale est totalement centrée sur la Finance et les banques. Aujourd’hui, l’affolement gagne les milieux politico financiers pour une raison en rapport direct avec la notion de « souveraineté populaire ». Les Grecs sont invités à répondre à la question : « Quelle est la couleur de la corde avec laquelle vous souhaitez être pendus » ? (FR3 22h 30 le 1.11.11). Quel scandale que de faire un pied de nez aux banquiers et à leurs valets politiques qui venaient de prétendre avoir sauvé leurs peuples en se pliant, une fois de plus, aux oukases des financiers mondiaux. Il n’est pas question que la Grèce, symbole créateur de notre civilisation, se mêle de ce qui ne la regarde pas. Le suffrage universel ? D’accord, mais « dans les limites de la loi financière ! L’Etat grec sera bien obligé de faire appel à une nouvelle dictature des « Colonels ». 

Il n’est pas que les Indignés de 2011et l’immense majorité des peuples qui ne supportent plus la dictature des banques et qui condamnent ceux qui, affligeants laquais élus des agences de « Notation financière », ne les « représentent plus : ces « indignés » qui en s’exprimant ainsi veulent les écarter de la gestion de la Société.
Un lecteur du journal « Le Monde » (mardi 1er novembre 2011) cite un président des Etats Unis qui régna entre 1801 et 1809, Thomas Jefferson.
«…  je pense que les institutions bancaires sont plus dangereuses pour nos libertés que des armées entières prêtes au combat. Si le peuple permet, un jour, que des banques privées contrôlent sa monnaie, les banques et toutes les institutions qui fleurissent autour des banques, priveront  les gens de toute possession, d’abord par l’inflation, ensuite par la récession, jusqu’au jour où leurs enfants se réveilleront sans maison et sans toit, sur la terre que leurs parents ont conquis ».
« Démocratie », ce mot valise (de billets de banques) semble prêt pour une nouvelle définition.

Archibald Zurvan  Le 1er novembre 2011.

(1) voir l’article du 6 juillet 2011 intitulé « LA FOIRE DU TRÔNE »
(2) Vaisseau fantôme ou joueur de football hollandais
(3) Entretien à l’Elysée, entre Michel Onfray et Nicolas Sarkosy dans la revue  « Philosophie Magazine » N° 8 d’avril 2007
(4) Terra Nova et les Gracques sont deux réservoirs d’idées (Think tank) au service du parti socialiste.
(5) Présent funeste, cette tunique empoisonnée colla à la peau d’Hercule et causa sa mort.
(6) Matthieu Pigasse, actionnaire du journal « Le Monde », Ancien fonctionnaire au Ministère des finances, chargé de la Dette et de la Trésorerie de la France. Ancien directeur de cabinet de Fabius et de Strauss Kahn. Ex directeur général délégué de la banque Lazard frères, administrateur des Casinos (maisons de jeux) du groupe Lucien Barrière.
(7) Libertad Albert,  « L’Anarchie N° 47, 1er mars 1906
(8) Jurgen Habermas : « Rendre l’Europe plus démocratique » (Le Monde 26 10 11). Les admirables pères : Jean Monnet, Robert Schumann.









vendredi 9 septembre 2011

DE LA PROFITATION (parait dans le Monde Libertaire 1643.



 1  LE VEAU  D’OR EST TOUJOURS DEBOUT .


la « profitation », comme disait il y a deux ans les guadeloupéens et Elie Domota, leur porte parole toujours en lutte contre les « profiteurs » et leur justice, la profitation est une idole vieille comme le Monde. L’idolâtrie du profit, la « profitation du plus fort au dépens du plus faible est la règle : La Règle d’Or. Cette idole dorée va couronner les discours, qui, depuis plus des mois font la Une des journaux et les commentaires savants des économistes, les spectacles de bavards télévisuels ou les savants débats radiophoniques, sur la Crise. Tremblons devant cette énorme Dette  qui n’est pas la nôtre.  La Rigueur, l’Austérité inéluctable pour « rassurer » les Marchés et les Bourses du Monde, va nous contraindre à nous serrer la ceinture. Econome, sérieux comptable, prévoyant,  l’Etat français, notre bienveillant Etat, toujours soucieux de ne pas entamer notre épargne ou nous mettre sur la paille, veut, comme ses homologues d’Europe,  inscrire en lettres d’or dans notre Constitution qu’il ne pourra dépenser plus d’argent qu’il n’en dispose. Et, pour ce faire, il veut organiser une cérémonie officielle de vote solennel réunissant tous les détenteurs de la Souveraineté du Peuple (députés et sénateurs). 
Cette Grand Messe aurait lieu dans les palais du Roi Soleil, à Versailles.
Il est un temps où, lorsque les pauvres, mais aussi une forte proportion des classes moyennes  commencent à bouger, il convient de les rappeler à l’Ordre du Sacré, de leur faire plier la tête devant la divine sagesse de « leur » Etat, devant les règles intangibles et protectrices,  inscrites en lettres d’Or, de leur Constitution. Et pourtant, Condorcet s’opposait à la sacralisation de la Constitution, la considérait comme simple référence morale de la liberté et de la justice, devant définir des règles en évolution permanente avec l’histoire des sociétés.  Or, on sait depuis la nuit des temps, que les fabricants d’Idoles, d’images divinement  sacrées,  tendent à pétrifier l’individu, le paralyser d’admiration béate mais aussi et plus radicalement de peur. Et l’histoire des Etats a montré leur « indifférence » à l’égard du Droit qu’ils instituent lorsqu’il doit s’appliquer aux politiciens de métier ou à leur clientèle. S’ils sont, dans ce cas, si étrangers au Droit, on voit mal pourquoi ils respecteraient un article de la Constitution qui les concerne directement. Le mensonge déguisé, le leurre, l’esbroufe (Le Monde 23 08 11 G Courtois)(1) font partie du « Réalisme » dans la gouvernance.

Ces « règles d’or », ces images pieuses, ces idoles pour lesquelles aucune explication, aucune justification n’est requise sont les talismans des classes politiques, qu’elles soient au pouvoir ou dans la recherche du pouvoir. La « Règle d’Or » est un bon talisman pour le pouvoir socialiste espagnol mais embarrasse les socialistes français qui voudraient bien s’en servir mais pas avant d’avoir pris le pouvoir. Un autre talisman de la même espèce est la « Croissance » ou encore le « PIB » (produit intérieur brut). Malheur à l’ « infidèle » qui veut savoir ce que recouvrent ces termes. L’hérétique ne doit pas poser la question diabolique. Que recouvre la « Croissance » et à qui est  elle profitable ? Au Chili, en effervescence depuis mai 2011, où la classe politique de gauche comme de droite est déconsidérée, 2 chiliens sur 10 détiennent 54% de la richesse. La « Croissance » est de 8,4 %. (Le Monde 27 08 11). La croissance n’a donc bel et bien aucun effet sur l’amélioration du sort des plus nombreux.
Mais ce veau d’or, cette constitution transformée en idole devant laquelle tout un chacun doit s’incliner a un objet encore plus maléfique. C’est de faire entrer dans les têtes que le profit, quel que soit son importance et les conditions de sa réalisation est un bienfait universel, une preuve évidente de l’honnêteté, de l’efficience du bénéficiaire. La marge brute est la balance de votre aptitude à bien produire et échanger. Les bas salaires, les délocalisations, les licenciements qui gonflent votre marge brute font de vous un entrepreneur ou un commerçant avisé. Le financier dispose d’une arme supplémentaire, avec bien entendu l’appui de l’Etat : c’est l’argent « virtuel », celui qui ne repose sur aucune richesse concrètement présente lors de sa création. Seuls les débordements sont mis sur la place publique. On parle alors de délit financier ou de corruption. Comme si la corruption n’était pas le fondement du système. Considérée comme naturelle et juste, elle infecte toutes les relations économiques et sociales dans la production du produit ou du service et dans l’échange. Puisque nous sommes à la fin de l’été, ceux qui ont pu voyager le constatent : l’espace  ou la qualité du service dans un train, une chambre d’ hôtel, une table de restaurant se restreint peu à peu, sans que l’entrepreneur se soucie du bien être de sa clientèle. On peut généraliser ce petit exemple à toutes les relations du commerce ou de la production.  L’égalité, l’équilibre dans l’échange entre celui qui vend son produit, son service ou ceux d’un autre et celui qui reçoit, sont  inexistants. Nous sommes bien au temps de la Profitation.

Mais le temps de l’ « indignation », de la révolte, de l’émeute, de la grève,  est, au bout du compte, arrivé. En Grèce, en Espagne, en Grande Bretagne, en Israel, au Chili  et aujourd’hui dans notre empire néo colonial, en Nouvelle Calédonie où notre Chanoine du Latran (Sarkosy) est en train de manier le fouet et les fausses promesses, les pauvres ne se résignent plus à subir leur pauvreté, ils n’acceptent plus la loi des « profiteurs », la charge de la « profitation ».

 S’approprier la richesse produite par d’autres producteurs de cette richesse que soi même,  empêcher ces autres producteurs de tirer eux mêmes profit de leur travail, prétendre fonder un tel droit exorbitant sur leur statut de propriétaire, sur la possession d’un bien qui ne génère en tant que tel aucune richesse nouvelle, tels sont les « profiteurs », les « frelons » de la profitation. Et si j’évoque Elie Domota, la Guadeloupe, la nouvelle Calédonie, c’est que le « profiteur » exerce son talent, là où il est le maître, le vainqueur d’une guerre, le colonisateur autant que celui qui, sur son sol, s’approprie ce qu’il n’a pas produit. On peut lire, à propos du livre « L’Art français de la guerre » (Le Monde 19 08 11) ces propos : …Une colonie est une terre et un peuple à disposition, un paradis pour le prédateur… ou encore…La chair coloniale est chair désirante, appétit sans limite, elle prend, pille, vole, viole, tue…
Tel est le catéchisme du  maître ès profitation. En Guadeloupe, deux ans après le mouvement contre cette forme de nouveau colonialisme et après une grève de 40 jours, amenant l’Etat français à signer un accord faisant droit aux revendications des guadeloupéens, non seulement l’Etat français refuse d’appliquer cet accord mais il lance des poursuites judiciaires contre les syndicalistes et ceux à la tête du mouvement de 2009. Une pétition de juin 2011 s’élève contre ce véritable coup de force. On peut y lire entre autres : « A propos de la volonté de musèlement et de criminalisation du LKP (Liyannaj Kont Pwofitasyon) par l'Etat français, Nous soussigné-e-s, déclarons tout comme le porte-parole du LKP, Elie DOMOTA : " Tous ceux qui refuseront d'appliquer l'Accord devront quitter la Guadeloupe... Jamais nous n'accepterons qu'une bande de békés rétablisse l'esclavage en Guadeloupe ».




2 LA  MESSE  EST  DITE
Ce remue ménage universel contre l’exploitation de « l’homme par l’homme » a ému, jusqu’aux larmes notre saint père, chef de l’Etat du Vatican
Pour le pape,  (Le Monde 20 08 11) « l’homme doit être au centre de l’Economie…l’Economie ne peut se mesurer par le maximum de profit »
La balle au centre, crient les amateurs du ballon rond, avant de lui donner des coups de pied ! L’homme exploité, colonisé, soumis, dépecé, résigné est bien au « centre » de l’Economie. Il n’est qu’un objet, une matière première de l’Economie. Quelque soit la taille du profit, il est entre les seules griffes des « frelons » de la City, des « émeutiers en col blanc » (voir 3ème partie).
Et si, comme certains papalins le font, on interprète ces paroles de Benoit 16 comme une invitation aux « profiteurs » à modérer leurs appétits et à atténuer la misère des pauvres, il faut savoir que pour le banquier du Vatican les grandes puissances devraient parvenir « à un consensus que seule une période d’austérité peut être la vraie clé pour une reprise de la croissance ». Cette austérité que le bon peuple de Dieu s’apprête à subir, a déjà eu ses premiers effets : Une bande de « seize salopards », comme l’écrit, par référence à un western américain, le Canard Enchainé » (24 08 11), et figurant dans le gotha des favorisés de la fortune, le bottin immond(ain)e des plus généreux bienfaiteurs  du Capitalisme, vient d’adresser une supplique au Président, le suppliant de leur faire rendre gorge en les taxant plus lourdement. Cet acte de contrition et de repentance, dirait Spinoza, n’est-il pas le redoublement de la faute ?
Autre surprise, venant de  la part d’un grand maitre de l’Etat espagnol chargé de la Justice de ce pays, (le Monde 19 08 11) :  on apprend que le Président du Conseil général du Pouvoir judiciaire espagnol (équivalent du président du Conseil supérieur de la Magistrature en France), un certain Carlos Divar, avait déclaré, lors de la préparation des Journées Mondiales de Jeunesse ( JMJ) : « C’est seulement dans le Seigneur que se trouve l’unique vérité. »
Cette « vérité » a cru apparaître, le 16 Aout, à un fanfaron désaxé, un mexicain de 24 ans, étudiant en Espagne et « volontaire » aux JMJ. Sur un Forum catholique, il exprimait son intention de commettre un attentat au gaz chimique contre la Marche laïque de protestation contre les JMJ. Le Pouvoir judiciaire espagnol se demandera  certainement si cet acte de folie ne le contraint pas à proposer des remèdes autres que  la « Vérité » du Seigneur. Et cette vérité, illustrée par l’Histoire de l’Eglise catholique, les jeunes  venus faire la Divine Fête à Madrid, la connaissent ils ? Comment pourront ils réagir aux propositions du pape, non seulement à s’en imprégner eux mêmes, mais aussi à « diffuser l’Evangile » ?  Fiers de leur Foi, ils porteront la « Vérité » du Seigneur aux infidèles.  Mais leur mission d’évangélisateurs devra se faire de façon grégaire avec le troupeau des fidèles. Ils seront guidés par les grands prêtres des Institutions pacifiques et traditionnelles catholiques, telles « Les Légionnaires du Christ » ou « L’Opus Dei ». En effet Benoit 16, ancien des jeunesses hitlériennes, que de jeunes infidèles ont traité de nazi aux JMJ, a précisé, en quittant l’Espagne, ce qu’il attendait de ses ouailles missionnaires : « Celui qui cède à la tentation de vivre la foi selon la mentalité individualiste qui prédomine dans la Société, court le risque de ne jamais rencontrer Jésus Christ ou de finir par suivre une image fausse  de Lui». (Le Monde 23 08 11).



Ce souci de protéger la jeunesse de toute diabolique curiosité, de toute indépendance d’esprit, de toute réflexion personnelle est le propre de tout dogme tout absolu, toute religion . Cette bénédiction protectrice du jeune, nécessaire à lui éviter tout faux pas est la noble mission des grands Maitres des Eglises. Ces jeunes catholiques venus faire la fête à Madrid ont-ils renoncé à tout ce qui fait leur jeunesse : la curiosité, l’insolence, le non conformisme, la critique ? Peut on dire qu’ils sont déjà marqués par l’âge ? Qu’ils ont renoncé à la fraicheur de leur personnalité de leur spécificité, de leur volonté propre ? Ne sont ils plus, avant l’âge, qu’abandon, renoncement, résignation, humilité et soumission ? Etre un « homo festivus » débutant d’une « Rave Party » catholique,  refuser son unicité, n’est pas signe de jeunesse. Dans ce cas, aussi , dirait Brassens, « le temps ne fait rien à l’affaire ».   Et Stirner aurait précisé : « … Que sert-il aux moutons que nul ne restreigne leur liberté de parole ?... ils ne feront jamais que bêler. Donnez à un croyant, qu'il soit musulman, juif ou chrétien, la permission de dire ce qu'il voudra. Il n'aura jamais que des niaiseries bornées à raconter... »








Après les « Indignés, les résignés, se réjouit le pape, contemplant la foule des jeunes catholiques, le 15 Aout à Madrid. Le même jour un autre Pape, celui du Boudhisme se glorifiait de recevoir à Toulouse (Le Monde 17 08 11), où il donnait une conférence sur « L’Art du Bonheur », le grand manitou des Indignés d’Europe, en la personne de Stéphane Hessel. Pour le DalaÏ lama, l’indignation de son ami français de 90 ans qui, preuve de sa bonté intérieure, marche sans canne, n’est qu’une forme de compassion contre l’injustice. Ce joyeux chef dont l’idole est le bouddha, s’apprête à renoncer au pouvoir temporel (Canard Enchainé 17 08 11). Il  ne renonce pas pour autant à décider de sa réincarnation, éventuellement en femme (sic), mais s’insurge contre l’idée que les chinois communistes et athées se mêlent de ce qui est sa propre affaire. Il faut dire que l’athéisme n’est pas en odeur de sainteté chez les adeptes du bouddhisme en phase préparatoire de réincarnation. Le livre de S. Hessel sera certainement traduit en tibétain et trouvera ainsi de nouveaux catéchumènes..
L’Individu se construit par la pensée individuelle, le jugement personnel, la singularité de chacun, de chacune, la diversité, la particularité, l’esprit critique, le questionnement, le dialogue contradictoire, la curiosité. De même, il renforcera sa personnalité, sa particularité en cherchant à mettre en doute, non pas sa propre capacité, mais tout ce que l’on lui inculque, ne se laissant entrainer par aucune « Autorité », quelque soit la séduction de cette dernière. Tels sont les irréductibles ennemis de la croyance, du dogme, de l’Absolu, de la Vérité éternelle, du catéchisme, de l’aveuglement, de la soumission, de la résignation.  Et on comprend mieux le souci, pour un envoyé de Dieu sur Terre, de tout tenter pour étouffer ce qu’il appelle la « mentalité individualiste ». En un mot, Croire ou Penser, il faut choisir, n’en déplaise à Descartes qui tentait désespérément de démontrer à l’aide de la raison, de la rationalité, de la logique de la pensée, l’existence de Dieu : Benoit 16 a choisi.

3  VOUS AVEZ DIT :  MORALE !

De l’émeutier « en col blanc »  au rentier« frelon ».

« De Tottenham (quartier pauvre de Londres) à la City, le même effondrement moral » titrait  «Le Monde » samedi 20 Aout 2011, page 16 .
… David Cameron parle d’effondrement moral dont souffrent uniquement les jeunes émeutiers de Londres. Le « Daily Telegraph » journal conservateur « suggère qu’à cause des financiers et des politiciens, l’immoralité est devenue la norme »… « La décadence morale de notre Société est aussi forte au sommet qu’au bas de l’échelle ». .. les émeutiers n’ont fait que copier les élites, « cupides, imprudentes et irresponsables »

Mais peut on parler d’une morale qui s’effondre ? La confiscation totale ou partielle d’un gain, d’un profit réalisé concrètement par d’autres que ceux qui s’en emparent autoritairement, au nom de la loi du plus fort, semble fort éloignée de la notion de « Morale ». Pour d’aucuns, c’est un vol. Or notre système économique et de relations sociales est fondé sur ce vol. L’importance quantitative de ce prélèvement est variable, mais son principe ne l’est pas. Pour le « capital » et son détenteur, il s’agit de minimiser la portée de ce vol. A cet exercice s’adonnent de brillants économistes. Lorsque les effets de ce prélèvement provoquent des crises  et, en prolongement, des troubles, d’éventuelles « catastrophes », il faut de la finesse et de l’imagination !

C’est ainsi que (Le Monde 21 08 11) , le Président du Cercle des Economistes, ne voudrait pas que nous nous « laissions aller au catastrophisme ambiant » et propose une « Economie plus subtile (sic), …dessinant une trajectoire de court et moyen terme »…fondée sur un « taux d’épargne plus faible et une épargne de long terme »..

« Quand l’émeute devient notre mode de vie ».  En Angleterre comme à la Bourse : Le Chaos. « Titres dans le Monde » du 21 08 11 »

Un magistrat honoraire, expert en sécurité urbaine (sic), M. Marcus, illustre, en comparant un « trader » à un émeutier ce qu’est la captation indue d’un bien. Allant plus loin dans la critique d’une justice sans « morale », il souligne que la répression sera d’autant plus sévère que l’émeutier a un statut social de faible niveau. Pire, ce serait parce que la justice d’Etat est impuissante contre les riches que les magistrats se défoulent sur les pauvres, en alourdissant les peines.
M. Marcus écrit, en effet : « …Les figures de l’émeutier sont diverses, c’est le trader, c’est le hooligan, c’est l’homme qui se joint à un rassemblement de beuverie, mais c’est aussi le tueur de Norvège ; Les émeutiers de Londres sont tout autant les gens de la City que ceux de Hackney (Quartier où « bobos » et pauvres se côtoient)…il est plus simple de contrer l’émeutier de la rue, de le réprimer à la mesure de la pauvreté de son statut social, de son poids dans la Société. Toutes les justices compensent leur impuissance à atteindre les émeutiers en col blanc… »

Dans le même numéro, on peut lire que le premier ministre britannique, dont les frasques d’une riche jeunesse sont décrites sous le titre « David Cameron échappe à la police (Le Canard enchainé 24 08 11) constate que la Société anglaise qu’il dirige est « en miettes ». Il proclame : « La « broken society, (société en miettes), est de retour au sommet de mon agenda » . Pour recoller sans attendre les morceaux il envisage de créer des zones de « couvre feu » dans les quartiers pauvres et des interdictions de sortir en fonction de l’âge et de l’heure. Il a surement souvenir qu’au temps de sa folle jeunesse un de ses passe temps favoris était de mettre en miettes, de dévaster complètement, avec ses jeunes amis fortunés une salle de restaurant de luxe. Bien entendu, le lendemain du forfait, il présentait ses excuses et payait le prix des dégâts. Quant au vice premier ministre il veut que les jeunes condamnés à des travaux de réparation des dégâts causés (on dirait ici, travaux d’intérêt public) soient  forcés de porter des vestes «  à haute visibilité » . On pourrait ajouter, par référence à une période également sans morale :  De couleur jaune, de préférence !

« La révolte des abeilles contre les frelons 

Sous le sous titre «  Il faut en finir avec la finance improductive », l’économiste Jean Louis Guigou écrit (Le Monde 18 08 11) : «….En économie, depuis la nuit des temps, les hommes n’ont trouvé que deux façons d’acquérir des ressources : Prendre, comme le fait le frelon, Créer, comme le fait l’abeille. Et cet économiste précise : …les abeilles sont celles qui produisent de la richesse et de la valeur ajoutée…Les frelons, en revanche, sont des prédateurs.. Les plus connus sont les rentiers, qui exploitent et spéculent … en Occident, s’ajoutent des prédateurs nouveaux, très virulents, qui opèrent soit dans la manipulation de l’information, soit dans la dérégulation financière…. Au sud comme au nord, les frelons prédateurs tirent leurs revenus exorbitants, non pas de la production-création-innovation, mais de leur proximité avec le pouvoir politique… Partout, dans le Monde, les abeilles travailleuses se révoltent contre les frelons prédateurs… les « indignés » de Madrid, les révoltés d’Athènes, les insurgés de Tel Aviv, et même les casseurs de Londres… » 

Et après avoir proposé quelques remèdes (taxation des « improductifs », traquer les faux métiers que les frelons ont investi, traquer les niches proches du pouvoir politique où ils prospèrent),  l’auteur, économiste, de ce texte ajoute, sentant bien que ses modestes solutions seront rejetés par les pouvoirs politiques et financiers :… «  mais, il faudra, aussi regrouper toutes les abeilles et rejoindre leur révolte contre les frelons. » 

On voit, par ces exemples que pour un économiste et un ancien magistrat, l’Etat, tout autant que l’organisation économique et sociale capitaliste sont, par nature en dehors de la morale, opposés à la justice, cette justice qui se fonde sur le respect de la dignité de chaque individu et de la défense de cette dignité lorsqu’elle est attaquée. Autant la justice d’Etat, distributive est sans rapport avec toute forme de morale, autant celle, anti autoritaire, qui repose plus sur le contrat que sur la loi, peut être considérée comme « morale ». Sur ce point fondamental, le philosophe Alain écrivait en 1912 :
 “...Quelle étonnante ambiguïté dans la notion de Justice. Cela vient sans doute principalement de ce que le même mot s’emploie pour désigner la Justice DISTRIBUTIVE et la Justice MUTUELLE. Or ces deux fonctions se ressemblent si peu que la première enferme l’INÉGALITÉ et la seconde l’ÉGALITÉ...”
Dans la première il y a en effet une autorité qui “donne à chacun la part qui lui revient”.. (Gd. Robert). La Justice mutuelle ou “commutative”, au contraire est celle qui “consiste dans l’égalité des choses échangées, dans l’équivalence des obligations et des charges...” (Gd. Robert).


Il est impossible, dans notre Société inégalitaire, de passer, sans accroc, d’une justice sans morale à une morale, une philosophie des mœurs qui respecte l’individu. La classe politique est, par nature, indifférente à ce problème fondamental. La classe politique étant déconsidérée, ce sera aux vrais indignés, non résignés d’agir. Et ce ne sont pas les seules populations d’Europe qui doutent de la capacité des détenteurs professionnels de la souveraineté populaire à tenir compte des aspirations des populations ! Notre honorable Conseil d’Etat, constatant cette incapacité des élus du peuple à assurer correctement leur mission, propose de « mieux associer le citoyen à la décision publique ».(pour poursuivre la réflexion sur cette invitation voir mon blog archibaldzurvan.blogspot.com « La Foire du Trône »(O9 O7 11).

A Paris, Le 31 du mois d’Aout. AZ

Notes :(1) La règle d’or ou les rois de l’esbroufe :
Il faut à la majorité actuelle un culot exceptionnel pour jouer subitement les professeurs de vertu budgétaire.  Leur projet de « constitutionnaliser » la limite des dépenses publiques à partir de 2013 est un leurre. Le texte de cette loi – article de la Constitution ne fixe aucune limite concrète et laisse à de simples « lois - cadres » votées chaque année le soin de définir un plafond de dépenses. 


samedi 9 juillet 2011

LA FOIRE DU TRÔNE.




Tous les étés, à Paris, à la lisière du Bois de Vincennes, se déroule une grande fête foraine : « La Foire du Trône ». Au Moyen Age le bon roi, Saint Louis , non loin de là, sous son chêne, préparait « La Justice » exterminatoire des infidèles, galvanisant ses bons chrétiens dans l’attente du départ en Croisade. Aujourd’hui il est remplacé par les forains, leurs attractions, leurs baraques, leurs tréteaux, leurs manèges, leurs loteries et leurs jeux d’adresse. En bombardant des marionnettes en bois, on peut gagner le « gros lot ». Tout près de cette « foire », d’autres bateleurs préparent leur propre « foire au Trône ». Cela s’appelle les « Primaires » socialistes. Plus d’une demi douzaine de marionnettes cette fois bien vivantes mais à la langue de bois s’efforcent d’attirer le chaland. Il s’agit, pour chacun d’entre eux, de rassembler suffisamment de badauds pour leur faire la courte échelle pour la montée sur le Trône. Il n’y a pas de lot à gagner sur le champ. Seul, le vainqueur de cette périlleuse ascension, une fois bien installé dans son Palais, douillettement assis sur son siège royal promettra monts et merveilles (et même plus). Ce sera la fête. On rasera gratis.

Ce pauvre parti socialiste, serviteur loyal et incompris de la « Féodalité mercantile et financière », ne sait plus où donner de la tête (1). Reconnaissant son impuissance, la vacuité de ses discours programmes, il s’en remet « au Français ». Pas celui qui connaît son histoire et n’apprécie guère les funambules. Pas tellement, non plus, le français patriote, républicain, citoyen, militant ! Ce qu’il vise c’est plutôt le français ludique, joueur télévisuel, « Homo Festivus » électronique. Le français qui a une âme enfantine, qui a fait sa première communion, qui « croit » sans trop « penser ». Le français qui est fier de sa puissance lorsqu’il plonge sa main dans une urne électorale  comme dans un bénitier. Un « vrai français » en sorte. Nul doute que ce « jeu de têtes » des aspirants à la couronne ne se transforme très logiquement en foire d’empoigne.

 Fin de Parti(e) ?
                                    Quel courage ! ces hommes, ces femmes politiques qui se lancent dans l’arène alors que les « indignés » grecs et espagnols les vouent aux gémonies et que leur aptitude à monter sur les planches est contestée un peu partout. Considérés comme de mauvais comédiens, inaptes à toute « représentation », ils essuient, de la part du public, quolibets et injures. Le Théâtre de la Cité, celui des Champs Elysées vont  t il leur fermer leurs portes ? On a vu (2) la semaine passée que les aptitudes de certains d’entre eux, candidats au Bac, étaient largement insuffisantes. Faudra t il traduire le « Vous ne nous représentez pas », en un « Vous ne vous représenterez plus » ?

Au delà de l’inaptitude, la dangerosité du métier ne fait que croitre. Un projet de loi ne prévoit t il pas que ces « élus du peuple souverain », s’ils deviennent ministres, ou simplement membres d’un cabinet seront « responsables de l’usage des deniers publics ». (3) Comme si les deniers publics n’étaient pas, par nature, de l’argent confié, pour le bien commun, par le peuple, à ceux choisis par lui comme guides.  Comme si ces deniers pouvaient ne pas être utilisés par eux à bon escient. L’exemple de ce sénateur socialiste du Tarn, chargé en qualité de « questeur » des comptes du Sénat est parlant. Dans un souci très « primaire » de se faire comprendre de ses électeurs, il avait organisé, pour une petite centaine d’entre eux, deux repas politico philosophique dans les salons du restaurant tenu par sa fille. Bien entendu la note de 2400 euros était  à la charge naturelle du Sénat, en tant que frais de représentation du peuple par son guide. (3bis) Au même moment, le Conseil d’Etat, constatant cette incapacité des élus du peuple à assurer correctement leur mission, propose de « mieux associer le citoyen à la décision publique ». En clair, il faudrait que les « porteurs de la souveraineté populaire » respectent leurs engagements et expliquent leurs intentions avant toute décision. Un vrai scandale ! la ruine de la protection prévue par la Constitution au profit des élus et qui interdit tout « mandat impératif », le politicien pouvant agir comme bon lui semble  pendant la durée de son mandat. Notre bien aimé chanoine du Latran avait pourtant été clair. En 2009, il s’écriait : « J’écoute, mais je ne tiens pas compte. »(4)

De la « démondia (bo) lisation ».
                                                Il y a quelques décennies, un certain Gary Davis, pour souligner la force des liens naturels et des intérêts qui unissent indissociablement les peuples de la planète « Terre », se présentait comme « citoyen du Monde ». Le fait évident de cette interdépendance peut s’appeler « Mondialisation ». Ce que nous appelons aujourd’hui la « Crise » n’est que la gestion démentielle de cette « mondialisation » par le Capitalisme. Une autre mondialisation fondée sur la solidarité et la justice et non pas sur la guerre économique et sociale peut voir le jour. Mais le Capitalisme ne pourrait survivre à un tel bouleversement. Et donc, ses soutiers, les porte flingues de la Finance internationale que sont les Etats et leurs élus présents et avenir, ne peuvent qu’amuser le tapis. Les uns veulent démondialiser en « mettant les banques sous leur tutelle », les autres crient à la réaction. Ainsi l’homologue de l’ancien patron du Fonds monétaire international,  le socialiste Pascal Lamy, directeur général de l’OMC, organisation mondiale du commerce, considère comme inéluctable la mondialisation capitaliste. En venir à un autre système est impossible. C’est un « concept réactionnaire » car le modèle capitaliste actuel est fondé sur « le porte conteneur et internet » (sic) (5). Pour un directeur de recherche à Science Po la « démondialisation » capitaliste est une idée « absurde qui de surcroit n’a aucune chance de voir le jour ». (6) Et pour mieux rassurer le bon peuple, un « Green Peace » de la finance, « Financial Watch », va faire contrepoids aux lobby de la finance à Bruxelles. Le constat est éblouissant. L’Europe est entre les mains des banques et des fonds spéculatifs. On lit : «  lorsque la Commission lance des consultations, 95 % des réponses proviennent de l’industrie financière ».(7) On imagine sans difficulté quelle va être l’influence de ce « contre poids ». Et pendant que les populations de l’Europe et du Monde font les frais de la « Crise », que les grecs et les espagnols manifestent contre leurs dirigeants soutiers de la Finance internationale, on peut lire une lettre de menace au peuple grec. Elle émane des « chroniqueurs économiques » de l’Agence Reuters. « Pliez vous aux exigences des banques et de vos élus, Ne soyez pas des enfants gâtés(sic) conduisant leur pays à la récession. Si vous vous obstinez votre niveau de vie baissera encore, Admettez que vous n’êtes pas irréprochables(sic), Vous étiez grassement payés dans le secteur public, Vous consommiez plus que ce que vous produisiez, vous preniez votre retraite trop tôt ». Quand on lit ces monstruosités écrites par des journalistes bien nourris au service  d’une officine anglo saxonne, on croit rêver. (8). Comment qualifier cette arrogance à l’égard de tout un peuple en plein désarroi ? Ces chroniqueurs stipendiés, porte voix de la Finance internationale, savent ce qui est bon pour leurs victimes et n’hésitent pas à les trainer dans la boue. Plutôt que de tenter d’analyser le comportement de leurs maitres, de faire apparaître ce qui a conduit à cette « Crise », ils menacent. Ils se refusent à voir que le système qu’ils valorisent et qui les valorisent est lui même une « Crise » permanente. Avoir pour règle de conduite la recherche du profit maximum, « donner la primauté aux intérêts des grandes entreprises industrielles et financières, faire de l’ « usager » des services collectifs publics une proie du « clientélisme », c’est à dire de la soumission aux intérêts privés ne peut que créer cette « Crise ». Comme l’écrit l’auteur de l’ouvrage intitulé « La Dette ou la Vie », le gouvernement grec, comme tous les autres, dépend du secteur privé pour son financement. Rien de surprenant, dans ces conditions que les investisseurs institutionnels (banques, assurances, fonds de pension, fonds spéculatifs se soient attaqués en 2010 à la Grèce, « maillon faible de la chaine européenne .(9) 

Le Mépris pour le plus faible
                        Dans l’actualité, un arrêt de la Cour de Cassation illustre ce mépris. Il s’agissait de dire si l’employeur pouvait fixer, pour certains salariés, n’importe quel horaire de travail, du moment que, sur l’année, il respectait, en les totalisant, les 35 heures hebdomadaires. Cette disposition inéquitable figure dans la Loi Aubry sur les 35 heures. Elle permet à l’employeur, alors qu’il se trouve, au terme du contrat salarial « léonin » en position de force, de faire travailler le salarié sans horaires de travail fixes  et autant de temps qu’il le souhaite.. Une des conséquences de cet accroissement de « dépendance » du salarié a pu conduire à la maladie, l’accident, voire, plus récemment, au suicide de certains cadres. Négligeant toutes ces considérations, la Cour de Cassation a maintenu ce dispositif aggravant l’inégalité du contrat salarial et confirmant la dépendance et l’affaiblissement du salarié. Poussant le cynisme jusqu’au bout de son dispositif, la Cour invite les employeurs à « mieux protéger la santé de leurs salariés » ; (10)

Ce mépris pour le faible et ce souci de l’affaiblir un peu plus par la crainte, la menace, la loi ou la jurisprudence est la règle. Déjà, en 1962, Un essai de bombe atomique avait mal tourné et de nombreux soldats , simples appelés, avaient été victimes de la radio activité, au su et au vu des autorités militaires et civiles qui ont gardé le silence. Aujourd’hui, à Flamanville, sur le site nucléaire de la future centrale « EPR », l’entreprise Bouygues omet de déclarer les accidents du travail dont sont victimes ses salariés. (11)

Il existe aussi un mépris qui s’exerce contre ceux qui ont peu de connaissances, qui n’ont pas fait d’études ni développé d’esprit critique, en un mot ceux qu’on accuse de faiblesse intellectuelle. Ce mépris agressif est souvent le fait de personnages qui se considèrent comme le « gratin du panier ». C’est ainsi que le philosophe autoproclamé, M. Onfray, spécialiste de la pensée binaire, s’en prend aux lecteurs de journaux. (12) Pour lui, ce qu’il appelle « le lecteur de base » « transforme souvent son quotidien en litière pour les chats ». Ce pauvre « lecteur de base » ne sait pas lire, ne comprend rien,  ne sait s’occuper que de excréments de son chat. Et puisque ce malheureux sans cervelle ne voit dans le journal qu’un papier poubelle ou un dévidoir de « catéchisme, de croyances et de préjugés », ces derniers ne peuvent être que des « machines à entretenir la paresse intellectuelle ». Mais alors, que dire de la littérature au poids ou au rabais ? Qui va savoir que M. Onfray a fourni aux boutiques de livres plusieurs douzaine de livres dont beaucoup ressemblent, en tout ou partie, à des journaux à scandale ou à des catéchismes? Qui saura que la psychanalyse est une non science, une thérapie frelatée mise en œuvre par un fidèle de Mussolini, un travailleur inféodé aux nazis ? Ce mépris pour ceux qui lisent et ceux qui écrivent dans les journaux est le signe d’une grande fatigue intellectuelle. Nous ne mépriserons pas le malade, pour autant.

Et ce n’est pas par ce que le mépris pour des salariés en grève apparait honteusement dans le journal qui nous sert de « remue méninges », que nous le considérerons comme simple objet de litière à chat. (13) Cet abaissement devant une législation inique concrétisée par un vote à l’Assemblée nationale et au Sénat qui organise la destruction du service public de distribution des journaux concerne non seulement des salariés en grève mais aussi l’ensemble de la Presse marginale et non conformiste. En effet notre journal, comme bien d’autres de cette sensibilité, est pris à la gorge financièrement par Prestalys, sous prétexte, comme à l’accoutumée, de « stratégie financière ». C’est bien de la liberté d’expression et de diffusion des idées qu’il s’agit. Pour couronner sa lâcheté méprisante, le petit chef nommé par des rois de la finance s’adresse aux lecteurs, privés deux jours de leur quotidien, en les traitant d’ « otages ». Il n’y a que peu de chances qu’il paye la rançon pour les libérer.

Un peu d’air pur !
                                    Chronique Hebdo suspend son vol en juillet et en aout. Il va ruminer dans les alpages. Selon l’événement et l’humeur des membres de l’équipe, il se peut que paraisse sur Internet quelques commentaires bien sentis. Mais, chers auditeurs, lecteurs, ne vous méprenez pas. Il vous faut aussi respirer pour mieux entamer la rentrée des classes.  Et même, tout en respirant, lire Céline puisque le premier juillet 2011 est le cinquantième anniversaire de sa mort. Revigorantes, pétulantes, les aventures du « Voyage » et de « « sanglés dans votre substance ». Au temps de son procès, notre journal, Le Libertaire, avait interrogé ses lecteurs et de nombreux écrivains sur ce qu’ils pensaient du « Procès Céline ». L’un des lecteurs de notre journal répondait : « Merci au « Lib » et merci Lemaitre (secrétaire de rédaction) de rompre le silence dont la presse pourrie veut entourer le procès Céline. Bardamu est nôtre, et s’il fut anti-, c’est d’abord anti con ; c’est pourquoi il a tant d’ennemis. Merci encore une fois, et pour Céline et pour ses lecteurs. »

Vous pouvez même lire le numéro spécial »Eté » du Monde Libertaire.

AZ  7 juillet 2011
                       
1. « L’aveu d’un échec » entretien avec R. Lefèvre.  Le Monde 28 juin 2011 
2. « Ah les beaux jours »
3. « Ministres et …devant la Cour des comptes. Le Monde 1er juillet 2011
3bis. « le questeur indélicat » Le Monde 7 juillet 2011
4. « Un débat « alibi ». Le Monde 29 juin 2011
5. « Un concept réactionnaire » Le Monde 1 er juillet 2011 
6. « Refusons la préférence nationale économique » Le M. 30 juin 2011 
7. « Financial Watch » Le Monde  30 juin 2011  
8. «Lettre ouverte aux grecs » Le Monde 1er juillet 2011 
9. « Pourquoi la crise… » Le Monde 30 juin 2011 
10. « Pour des hraires « raisonnables » » Le Monde 1er juillet 2011
11. « Les irradiés de Beryl » et « des accidents occultés » Le M.27 et 30 juin 
12. « Les journaux » Le Monde 27 juin 2011 
13. « A nos lecteurs » Le Monde 7 juillet 2011